Pompes funèbres : quand la mort devient un business

Avec environ 590 000 décès par an en France et un marché s’élevant à 2,5 milliards d’euros, la mort est devenue un business rentable. Auparavant à la charge du service public communal, le secteur funéraire est désormais géré par des entreprises privées « obsédés » par la rentabilité. Hausse des prix, pratiques abusives, arnaques… Comment le secteur funéraire a-t-il dérivé en 40 ans ?

Le funéraire : une entreprise comme une autre

Le vieillissement de la population devrait engendrer 750 000 décès par an d’ici 30 ans. De nombreuses entreprises souhaitent donc s’implanter sur le marché du funéraire et y voient une réelle opportunité financière. L’offre sur le marché est très large et les prix pratiqués sont abusifs. En effet, le prix d’un cercueil peut atteindre jusqu’à 4000 € !

Le leader du funéraire, OGF PFG, réalise 125 000 obsèques par an et possède 20% de parts de marché. Il existe également d’autres acteurs influents telles que « Le Choix Funéraire » et « Roc Eclair ». Face à ces acteurs, des centaines d’enseignes essayent de survivre sur le marché.

Certains groupes relèvent d’ingéniosité pour augmenter le prix final de la facture client en proposant des services complémentaires. Le client a par exemple la possibilité de disposer ses cendres en mer ou même de les envoyer dans l’espace. Autre pratique courante mais interdite en France : transformer les cendres de son bien aimé en diamant.

Le funéraire est aussi très présent sur internet puisqu’il existe des applications payantes telles que « le coffre-fort numérique » qui vous propose de classifier les papiers du défunt ou encore « la sépulture numérique » qui vous permet de revoir le défunt et d’entendre sa voix.

D’autres acteurs proposent des services gratuits. C’est notamment le cas de Thierry CEOTTO (interview sur Rénonance Funéraire), gérant de pompes funèbres à Vitry le François, près de Metz. Ce chef d’entreprise met à disposition de ses clients le corbillard de Johny Hallyday pour les enterrements. Il associe cette pratique à son « image de marque ». Un terme qui confirme que le marché du funéraire peut s’apparenter à celui de la banque ou des assurances.

Il faut savoir que la situation était complétement différente au début des années 1980 puisque le secteur funéraire n’était pas privé.

Du service public communal aux entreprises privés

Le marché du funéraire a connu de nombreuses évolutions en 40 ans. Auparavant, ce dernier était géré par le service public communal. Au fil du temps, le marché a été délégué à des partenaires privés. Le changement majeur a eu lieu au début des années 1980 lorsque « La Lyonnaise des Eaux » est devenue actionnaire du leader « OGF PFG ». Désormais, les préfets n’ont plus aucun contrôle sur le cahier des charges des pompes funèbres, ce qui justifie la hausse des prix pratiqués.

C’est au début des années 1990 que le marché du funéraire s’ouvre à la concurrence. Depuis, des milliers de magasins funéraires ont été créé. Un nouveau marché a d’ailleurs vu le jour : la prévoyance obsèques. Le principe est simple : le futur défunt signe un « contrat obsèques » auprès d’une banque ou d’une assurance afin d’assumer les frais liés à son décès. Cependant, les souscripteurs signent généralement beaucoup trop vite. En effet, il existe de nombreuses clauses contractuelles qui les empêchent de récupérer leur argent, comme par exemple le fait de mourir trop jeune (avant la date prévue dans le contrat).

Les entreprises funéraires réaliseraient également des ententes, selon l’enquête de Secrets d’info sur France Inter. Par exemple, un client de l’assureur Aviva a souscrit un contrat sans préciser l’identité de la personne qui devait l’enterrer. Ce dernier a été relancé par l’assurance qui lui a proposé une carte souscripteur avec le numéro de l’entreprise OGF. Ce démarchage s’apparenterait à du détournement de clientèle.

Autre pratique abusive, certains grands groupes funéraires facturent une commission de 10 % à leurs clients lorsqu’ils doivent faire appel à une entreprise concurrente pour réaliser l’enterrement. Une pratique courante pourtant interdite et passible de 5 ans d’emprisonnement ainsi que 75 000 € d’amende.

Afin d’éviter de se faire arnaquer, UFC Que Choisir publie un guide « Bien choisir son contrat d’assurance obsèques » pour vous accompagner dans la préparation de vos obsèques.

Des alternatives innovantes et respectueuses

Malgré toutes ces pratiques abusives sur le marché, certains acteurs innovent et proposent des prestations orientées sur le service. C’est notamment le cas des coopératives funéraires, concept venu du Canada et qui commence à voir le jour en France.

La Coopérative de Pompes Funèbres Nantaise, basée à Orvault (métropole de Nantes), considère que le décès d’un être humain ne doit pas être l’occasion d’exploiter le deuil. Elle fournit une prestation à partir de 990 euros, soit un tarif environ trois fois moins élevé que le coût moyen des obsèques en France. Afin de proposer des prix attractifs, la coopérative offre de nombreuses alternatives à ses clients : possibilité de prendre un cercueil sans vernis ou bien encore en carton, mais également des tombes végétalisées, etc.

Ce mouvement coopératif s’inscrit dans la tendance actuelle vers davantage d’authenticité, que l’on retrouve dans l’alimentation également. En 40 ans, le secteur du funéraire a considérablement évolué. Espérons que de nouveaux acteurs comme la Coopérative Funéraire de Nantes voient le jour rapidement sur le marché.

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Journaliste de formation, j'occupe actuellement la fonction de rédacteur au sein du réseau des sites Internet de services aux entreprises du groupe Libbre. Je peux justifier d'une expérience de six ans dans la presse quotidienne angevine au sein de trois quotidiens : la Nouvelle République, Ouest-France puis le journal majoritaire en Maine-et-Loire : le Courrier de l'Ouest (2007-2009).

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